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introduction

septentrionale, et nous nous bornerons à indiquer, par l’exemple de deux guerriers, alliés des fils Herbert dans la lutte contre Raoul de Cambrai, quelle proportion de vérité historique peut encore recéler le second plan du poème. Ernaut de Douai, qui a la main droite coupée par Raoul, est nommé à plusieurs reprises par Flodoard : vassal de Herbert II dès 930, il perdit, l’année suivante, la ville de Douai que le roi Louis IV lui fit restituer en 941[1]. De même, le comte Bernard de Rethel est mentionné par Flodoard, qui le désigne plus exactement comme comte de Porcien[2], pays dont Rethel fut démembré au xe siècle.

Les mœurs féodales dans la première partie du Raoul portent aussi en plus d’une strophe les marques d’une certaine antiquité ; il serait plus difficile toutefois de faire ici le départ de ce qui appartient véritablement au xesiècle. L’hérédité des fiefs n’y est point encore complètement établie[3], mais il faut reconnaître que les remanieurs ne pouvaient guère, sans nuire à l’économie du poème, introduire sur ce point les coutumes de leur temps. La réparation, à la fois éclatante et bizarre, que Raoul offre à Bernier après l’incendie d’Origny[4], et qui est l’une des

  1. Annales Flodoardi, aux années 930, 931 et 942.
  2. Ibid., aux années 933 et 945 ; Historia Remensis ecclesiæ, l. IV, c. 31 — Au xiiie siècle, Aubri de Troisfontaines, empruntant à Flodoard la mention qu’il fait du comte de Porcien sous la date 945, l’appelle « comes de Retest Bernardus », d’accord en cela avec le poème de Raoul.
  3. Notamment en ce qui concerne le fief de Vermandois que le roi concède à Raoul, bien que le comte défunt ait laissé quatre fils.
  4. Voici en quoi consistait cette réparation : Raoul offrait de se rendre d’Origny à Nesle, localités qu’une distance de « 14 lieues » (en réalité 43 kilomètres) séparait, accompagné de cent chevaliers