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de Robinson Crusoé.


Tandis que je fus éloigné de terre, je craignois qu’au moins mes provisions ne fussent dévorées par les bêtes ; mais quand je retournai, je ne trouvai aucune marque d’irruption, sinon qu’il y avoit un animal semblable à un chat sauvage, assis sur un des coffres, lequel, quand il me vit approcher, s’enfuît à quelques pas de-là, puis s’arrêta tout court ; il ne paroissoit ni décontenancé, ni effrayé ; & il me regardoit fixement, comme s’il eût eu quelque envie de s’apprivoiser avec moi ; je lui présentai le bout de mon fusil, mais comme il ne savoit pas de quoi il s’agissoit, il ne s’en ébranla point, si ne se mis aucunement en devoir de prendre la fuite ; voyant cela, je lui jetai un morceau de biscuit, quoiqu’à dire vrai je n’en fusse pas fort prodigue ; car ma provision n’étoit pas bien grosse ; mais vous noterez s’il vous plaît que ce n’étoit qu’un petit morceau, & je crus ne pas faire grande brêche à mon magasin ; quoi qu’il en soit, l’animal ne dédaigna pas le présent que je lui offris ; il accourut dessus, le flaira, & puis l’avala : il prit si bien la chose, qu’il me fit connoître, par son air content, qu’il étoit disposé à en accepter une autre dose ; mais je l’en tins quitte : & voyant qu’il ne gagnoit rien à revenir à l’offrande, il prit congé de moi.

Comme c’étoient de grands & de pesans tonneaux que ceux où notre poudre étoit renfermée,