Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 18.djvu/224

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
219
de milord Céton.

mêmes ; la vertu & le vrai mérite restent souvent dans l’oubli : il y a des gens d’un esprit très-borné qui se font néanmoins distinguer ; on en voit de braves, mais dont les autres qualités ne répondent point à leur valeur ; de grands capitaines, mais de petits génies ; d’autres qui ont l’esprit élevé, & qu’on regarde comme de bonnes têtes, mais dont l’ame est basse & le cœur mauvais. J’ai vu, seigneur, beaucoup de personnes dont l’esprit & le mérite n’a pas le bonheur de plaire, qui, avec tous les talens qu’ils ont reçus de la nature, n’ont pu y joindre celui de se faire aimer. On en voit d’autres qui brillent dans le mouvement & dans l’action, mais que le repos obscurcit & anéantit, parce qu’il n’y a que les emplois & les dignités qui les font valoir, & qui, dans la retraite ne sont plus que l’ombre de ce qu’ils étoient ; c’est que dans la plupart de tous ces mondes, les personnes d’un vrai mérite, ne sont point employées dans le ministère, & qu’on ne confie les plus grands intérêts qu’à des gens qui n’ont pas même pour eux l’esprit de conduite, si nécessaire au bien de l’état. Cette méthode, il est vrai, paroît bien inconséquente mais lorsqu’on réfléchit sur le génie de ces nations, dont le feu, l’inconstance, la légereté & l’esprit d’intrigue sont à-la-fois les moteurs de toutes leurs actions, on n’est plus surpris d’une pareille conduite ; d’ailleurs, la plupart se font