Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 20.djvu/26

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communiquer, ils étoient dans une monſtrueuſe ignorance ; la nature groſſière faiſoit toutes leurs loix ; ils ſe dévoroient les uns les autres. Sérapis du haut de son trône éternel eut compaſſion de leur aveuglement ; il réſolut de les rendre ce qu’ils ſont aujourd’hui ; mais il voulut mettre à l’épreuve leur cœur féroce, & connoître s’ils étoient dignes des faveurs qu’il leur réſervoit : il prit la forme d’un bœuf, inconnu par eux jusqu’alors : il parut un jour au milieu d’une prairie émaillée de mille fleurs, & il ſe mit à paître devant le peuple aſſemblé à l’occaſion d’une fête qu’il faiſoit pour une victoire remportée ſur des ennemis voiſins, célébrée en mangeant leurs priſonniers. C’étoit, ſelon l’accueil que Sérapis recevroit de ce peuple barbare, qu’il devoit le combler de biens, ou l’exterminer entièrement.

Les Égyptiens, étonnés à l’aſpect nouveau qui ſe préſentoit à leurs yeux, jettèrent des cris d’étonnement & de joie ; ils coururent en foule vers le bœuf ſacré. Sa préſence leur inſpira le reſpect & l’amour ; ils ſe prirent par les mains, & firent des danſes en rond en ſon honneur ; d’autres, animés par un zèle indiſcret, & qui agiſſoit malgré eux dans leurs cœurs groſſiers, coururent chercher des membres de leurs priſonniers découpés, & les pré-