Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 20.djvu/86

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quoi me déſalterer. Je n’en eus pas plutôt bu ; que je me trouvai dans une eſpèce d’ivreſſe, laquelle m’ayant provoqué à un ſommeil profond, je m’étendis au pied de l’arbre, & je m’abandonnai au repos.

Je ne goûtai pas long-tems la tranquillité que je m’étois propoſée ; je fus éveillé en ſurſaut par des cris épouvantables, qui ſe faiſoient au-deſſus de moi ; j’ouvris les yeux, & je vis l’arbre couvert des poules dont j’ai parlé, elles ſautoient de branches en branches, avec une inquiétude extrême. Je conſidérai quelque tems leur manège ; & je conjecturai qu’ayant trouvé le trou bouché, elles étoient ſorties par le haut de l’arbre : le l’ouvris pour voir ſi les choſes n’étoient point changées ; elles étoient toutes montées vers le haut, & le bas étoit déſert ; un des petits étoit à l’entrée, qui s’était apparemment tué en tombant : je le pris ; & après l’avoir examiné, je ne fus plus ſurpris de leur murmure ; il provenoit de ce qu’elles ne pouvoient s’envoler, leurs aîles étant des nageoires qui ſe replioient les unes ſur les autres, & qui ne pouvoient leur ſervir que pour nager. Leur dos ſeul étoit couvert de plumes, & leur ventre d’écaille de poiſſon ; je jugeai par leurs griffes & par la douceur de leur peau, qu’elles devoient être excellentes au goût, & l’expérience