Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 25.djvu/412

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quassent, quand l’occasion s’en trouveroit favorable.

Cependant la dame étoit dans des agitations continuelles. Elle se reprochoit tous les jours, comme une foiblesse inexcusable, de se voir dans des sentimens qu’elle n’avoit pu causer ; & quoique, dans la résolution qu’elle avoit prise de demeurer veuve, elle ne dût souhaiter rien tant que de n’être point aimée, elle étoit au désespoir de ne l’être pas. Étrange bizarrerie de l’amour ! Elle convenoit avec elle-même que le cavalier l’aimant, elle auroit peine à se garantir de vouloir changer d’état, & ce péril ne l’étonnoit pas assez pour l’emporter sur la honte qu’elle se faisoit de trouver son cœur sensible, sans qu’elle eût touché le sien. Enfin, le temps de leur séparation finit. Le cavalier étant de retour, son premier soin fut d’aller chez elle, & l’embarras où il se trouva, par ses nouveaux sentimens, mélant à sa joie un trouble secret, qui l’empêchoit de paroître dans tout son excès, la dame crut que cette joie étoit médiocre ; & soit pour lui rendre indifférence pour indifférence, soit que la crainte de rien laisser échapper qui fût contraire à sa gloire, l’obligeât de s’observer, elle le reçut avec assez de froideur. Le cavalier, surpris de cet accueil, ne put s’empêcher de dire, qu’après ce que le