Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 25.djvu/93

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entendre ce langage, & elle rioit de ce que les autres, qui ne l’avoient jamais appris, n’y comprenoient rien, comme si c’eût été la plus belle chose du monde. Elle versoit du vin & des liqueurs au jeune Prenany & à Agis, & tâchoit, par son exemple, d’exciter tout le monde à la joie. Elle chanta les chansons les plus vives & les plus gaies, & fit voir que si elle dansoit à merveille, elle s’acquittoit aussi bien du reste, lorsqu’il le falloit.

Prenany & le jeune page étoient enchantés. Pour le joueur de flûte, il ne disoit mot, non plus que les satyres, qui se contentoient de regarder la nymphe avec des yeux ardens, & que le vin & les liqueurs enflammoient encore.

Après que l’on eut passé un temps considérable dans ces plaisirs, la nymphe prit soudain un petit air triste, qui fit évanouir toute la joie. Elle se frotta un peu le front avec le bout des doigts, & dit aux satyres, avec un souris languissant : Je me sens un violent mal de tête ; je vous prie, laissez-moi un peu tranquille. Pour vous, dit-elle au prince & à son compagnon, demeurez ; j’ai affaire de vous. Les satyres, sans répliquer, se retirèrent, en faisant chacun une grande révérence avec leur pied de bouc.

Dès qu’ils furent partis, la nymphe reprit