Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 3.djvu/104

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laquais, en s’efforçant de ma donner l’esprit & les sentimens d’un honnête homme. Puisqu’il avoit envie d’épouser une esclave, il auroit agi conséquemment, en prenant la résolution de n’avoir que des enfans esclaves, & de les élever d’une manière conforme à leur naissance. Mais il a mieux aimé me rendre doublement malheureux ; il m’a procuré ce visage terrible, que vous me voyez, & a pris soin de mon éducation : mais plus il a formé mon esprit, plus il m’a rendu mon sort sensible ».

Ce discours, qui finit par un ruisseau de larmes, me parut extrêmement touchant, & je crois que je ne l’oublierai de ma vie, sur-tout parce qu’il fut prononcé par un homme qui me parut le plus judicieux, le plus modeste & le plus digne d’estime.

Je finirai, par cette histoire, ce que j’avois à dire sur ce sujet, persuadé que je ne saurois y ajouter rien d’aussi pathétique. J’en conclus, qu’une bonne méthode d’élever les enfans & de les introduire dans le monde, est une dette réelle, qu’il faut payer absolument, si l’on a la noble ambition d’avoir place parmi les gens d’honneur.

Le même principe d’honnêteté nous oblige de nous acquitter de nos devoirs envers une femme & envers un domestique, à proportion que les