Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 3.djvu/103

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de lui demander s’il étoit né en Angleterre.

« Monsieur, me répondit-il avec beaucoup de politesse, mais les larmes aux yeux, je puis vous assurer que je suis Anglois, né dans la Grande-Bretagne ; je dois le dire à la honte de mon père, qui, étant né Anglais lui-même, a eu la lâcheté de s’unir à une Indienne, quoiqu’il dût être persuadé que les enfans qu’il auroit d’elle, maudiroient à jamais la mémoire d’une action si lâche, & qu’ils auroient en horreur le nom de leur père, toutes les fois qu’ils y penseroient. Oui, oui, continua-t-il, je suis Anglois, né d’un légitime mariage, & je me croirois heureux si j’étois plutôt bâtard, & mis au monde par la femme la plus débauchée de l’Europe, par la plus maussade des servantes. Peut-être mon père, en contractant cet indigne mariage, a-t-il satisfait à ce qu’il devoit à sa noire maîtresse ; mais certainement il n’a pas songé à ce qu’il devoit à ses futurs enfans. Si je n’avois pas, sur le visage, cette maudite teinture de démon, j’aurois pu me pousser dans le barreau, ou parvenir à quelque dignité ecclésiastique ; mais, à présent, les études qu’on m’a fait faire, ne sauroient aboutir qu’à me rendre savant valet-de-chambre. Je ne saurois m’imaginer pour quelle raison mon père m’a envoyé au collège. Il a gâté un bon