Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 3.djvu/81

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absolument contraire à l’équité. Il trompe celui dont il prend l’argent & qui le hasarde, dans la supposition que le fonds de son débiteur répond à son crédit. Il est mal-honnête homme, quand même, en cas qu’il vienne à manquer, il payeroit à ce dernier créancier toute la somme dûe ; car il est certain que ses autres créanciers ont eu, avant le contrat qu’il a fait avec le dernier, un droit sur tous ses effets, chacun à proportion de ce qui leur étoit dû ; par conséquent, s’il ne donne à ceux-ci qu’une portion, & la somme totale à celui-là, il leur fait une injustice réelle.

Si les hommes consultoient ce principe de droiture, qui est dans leur raison, ils verroient qu’il n’est permis d’emprunter de l’argent, que lorsqu’on a une certitude morale qu’on sera en état de payer. Emprunter, c’est promettre de payer ; & promettre absolument ce qu’on n’est pas sûr de pouvoir tenir, c’est agir en mal-honnête homme, comme je le prouverai ci-après. Supposé même que dans la suite on se trouve en état de payer, & qu’on paye actuellement, cet heureux succès & cet acte de probité ne redressent pas ce qu’il y avoit d’irrégulier dans l’emprunt ; on a réellement trompé son créancier, en lui faisant courir un plus grand risque qu’il ne le pensoit & qu’il ne le vouloit. On lui a donné des idées fausses du fonds qui devoit faire la sûreté du