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Les larmes jaillissent de mes yeux,
Des larmes amères…

Une jeune fille
Au bord du chemin,
Pas très loin de moi,
Ramassait du chanvre.
Elle entendit que je pleurais,
Vint à moi avec une bonne parole
Et me donna un baiser.

Ce fut comme si le soleil eût reparu
Et comme si le monde entier m’eût appartenu :
À moi les champs, les prairies, les vergers !
Tout en plaisantant, nous menâmes
Boire les agneaux, qui n’étaient point à nous.

Vanité ! Et pourtant quand j’y pense,
Mon cœur se serre et me fait mal.
Pourquoi, mon Dieu, ne m’avoir pas laissé
Couler ma courte vie dans ce paradis !
Je serais mort en labourant les champs
Et sans avoir rien connu du monde.
Je n’aurais pas passé pour un fou aux yeux des gens
Et je n’aurais pas maudit et Dieu et les hommes !

1847.


Je ne suis pas malade — Dieu m’en garde !
Mais mon œil voit quelque chose
Et mon cœur est dans l’attente. Il souffre,
Souffre, pleure et ne s’endort pas,
Comme l’enfant à qui l’on n’a pas donné le sein.

Dans ces jours sombres et malheureux,
Qu’espères-tu ? Il n’y a rien de bon à attendre.
N’attends pas le réveil de la liberté,
Elle dort ; c’est le tzar Nicolas
Qui l’a endormie et pour réveiller
La liberté malade, il faudrait que le monde
Entier se mît à tremper le fer
Et à aiguiser le tranchant de la hache,
Pour aller la réveiller.

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