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geant en Ukraine s’étonnait-il que dans aucun pays au monde on ne priât Dieu avec tant de ferveur, nulle part les maris n’aimaient tant leur femme et les enfants leurs parents. Et lorsque les seigneurs et les jésuites voulurent mettre de force l’Ukraine sous leur dominations et faire croire à des chrétiens ukrainiens que tout ce que le pape disait était vrai, alors apparurent en Ukraine des confréries, comme celles qui existaient chez les premiers chrétiens et tous, s’étant fait inscrire dans une de ces confréries, qu’ils fussent seigneurs ou paysans, se donnaient entre eux le nom de frère. C’est pour que les gens vissent que la vraie foi existait en Ukraine, que là il n’y avait point d’idoles et qu’il n’y surgissait pas d’hérésie.

Or les seigneurs virent que la classe cosaque s’accroissait et que sous peu il n’y aurait plus que des cosaques, c’est-à-dire, des hommes libres et ils s’empressèrent de défendre à leurs serfs qu’ils ne devinssent cosaques et ils voulurent abaisser le menu peuple au niveau de la bête, de façon qu’il n’eût plus ni sentiment, ni raison. Et ils se mirent à exploiter leurs serfs, les abandonnant aux juifs, les livrant à des supplices qui n’avaient eu de semblables que ceux des premiers chrétiens : ils les écorchaient vifs, faisaient cuire leurs enfants dans des marmites et mirent des chiens aux mamelles des mères pour qu’elles les allaitassent.

Et les seigneurs désiraient rendre le peuple aussi stupide que le bois ou la pierre ; ils ne lui permirent plus d’aller à l’église pour faire baptiser les enfants, se marier, communier ou enterrer les morts, afin que les gens du peuple perdissent tout visage humain.

On se mit aussi à opprimer les cosaques, à les faire disparaître, car une confrérie chrétienne de ce genre nuisait aux intérêts des seigneurs.

Mais il n’en fut point comme les seigneurs l’avaient pensé, car les cosaques se révoltèrent et les gens du peuple suivirent leur exemple. Ils battirent et chassèrent les seigneurs et l’Ukraine devint la terre libre des cosaques, car tous furent égaux et libres, mais pas pour longtemps.

Et l’Ukraine voulut de nouveau vivre fraternellement avec la Pologne, étroitement unies, mais distinctes — cependant la Pologne ne voulut renoncer en aucune manière à ses prétentions seigneuriales.

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