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Alors l’Ukraine se rapprocha de la Moscovie et s’unit à elle, comme un peuple slave s’unit à un peuple slave, étroitement, mais sans se mêler, à l’image des trois hypostases de Dieu, unies et distinctes, comme s’uniront dans l’avenir toutes les nations slaves entre elles.

Mais l’Ukraine s’aperçut bientôt qu’elle était tombée dans l’esclavage, car, dans sa simplicité, elle n’avait pas remarqué ce qu’était le tzar moscovite ; or le tzar moscovite n’était pas autre chose qu’une idole et un tyran.

Et l’Ukraine se détourna de la Moscovie et la malheureuse ne savait plus sur quoi reposer sa tête.

Car elle aimait et les Polonais et les Moscovites comme des frères, elle ne désirait pas se brouiller avec eux, mais voulait qu’ils vécussent ensemble, qu’ils s’unissent comme un peuple slave s’unit à un autre peuple slave, que ces deux s’unissent à un troisième et qu’il y eût trois Républiques unies dans une seule alliance, étroitement mais sans se mêler, à l’image des trois hypostases de Dieu, unies et distinctes, comme dans l’avenir les nations slaves s’uniront entre elles.

Mais ni les Polonais, ni les Moscovites ne la comprirent. Et les seigneurs polonais et le tzar moscovite virent qu’il n’arriveraient à rien avec l’Ukraine et ils se dirent entre eux : que l’Ukraine ne soit ni à toi, ni à moi, déchirons-la par moitié, puisque le Dniéper la divise en deux ; que la rive gauche soit donnée en jouissance au tzar de Moscou et que la rive droite devienne la proie des seigneurs polonais.

Et l’Ukraine se défendit pendant cinquante ans et ce fut la guerre pour la liberté la plus sacrée et la plus glorieuse qu’il y ait dans l’histoire, comme aussi le partage de l’Ukraine fut la plus grande infamie que l’on puisse trouver dans l’histoire.

Et l’Ukraine s’était épuisée : les Polonais chassèrent les cosaques de la rive droite du Dniéper et les seigneurs régnèrent sur les malheureux restes d’un peuple libre.

Or, sur la rive gauche les cosaques se maintenaient encore, mais peu à peu ils tombèrent dans l’esclavage sans espoir du tzar moscovite, puis de l’empereur de Pétersbourg, car le dernier tzar de Moscou et premier empereur de Pétersbourg coucha des centaines de mille de cosaques dans des fossés et sur leurs os bâtit sa capitale.

Et la tzarine allemande Catherine, la notoire adultère, l’impie, la meurtrière de son mari, donna le dernier coup à l’organisa-

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