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Foin de malheur, ma pauvre tête !
Et mes gros sous sont envolés.
L’homme n’a laissé que ce sac
Quand j’achetais ce chat en poche.
Mais pourquoi suis-je donc si bête.
De ne point regarder le sac
Et voir ce qui était dedans.
Le diable emporte la besace !
On l’a dit : il ne faut se fier à personne,

(Il cherche les pots.)
Et mes pots, les voilà partis.

Pauvre homme, qu’ai-je donc gagné
À cette foire de malheur !
J’ai un sac en guise de pots,

(Il cherche son manteau qu’il avait posé sur les pots.)
Mon bon manteau aussi n’est plus.

Que me reste-t-il donc à faire ?
Foin de malheur, ma pauvre tête.
Ma mère, m’as-tu mis au monde
Pour que je perde tout mon bien !

Kvacha.

Voici un spécimen de la poésie populaire burlesque, cultivée par les maîtres et surtout par les élèves des écoles ecclésiastiques, organisées à l’époque de la première renaissance sur les modèles occidentaux. La Kvacha, espèce de brouet fermenté, servait de nourriture habituelle aux écoliers indigents et jouait surtout un grand rôle en carême. Elle a souvent servi de thème à plaisanterie.

Vous ne savez, Messieurs, ce qui m’est arrivé.
Il faut donc vous conter toute ma malechance.
Que puis-je faire, moi, n’étant pas né coiffé,
Sinon chanter au chœur pour ma maigre pitance.
À fêter la Noël je m’étais préparé,
Mais il n’est mauvais tour que sorcière ne fasse.
Un grand pot de Kvacha j’avais fait apprêter ;
J’aurais à le manger bien invité Vos Grâces.
Sans doute quelque femme avait dû m’envoûter
Et privé ma Kvacha de couler dans vos panses ;
À peine sur le feu fut-elle à fermenter
Que nos clercs effrayés s’enfuirent à distance.

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