Page:Apollinaire - L’Enfer de la Bibliothèque nationale.djvu/251

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le marquis semble avoir joué comme cause de la prise de la Bastille.

Nous avons lu, aux Mss de la Bibliothèque Nationale, le premier brouillon, le premier jet de la Justine, qu’on n’a pas encore publié. Ce manuscrit original a été écrit en quinze jours, de la fin juin au 8 juillet 1784. À cette époque, le marquis avait renoncé à en faire un roman et ne voulait plus qu’un conte qui devait être joint à son ouvrage intitulé : les Crimes de l’amour.

M. Jean Florence, traitant, dans la Vie intellectuelle du 15 fév. 1911, du sadisme et du marquis de Sade, parle des illogismes qui abondent dans les œuvres du divin marquis et de son style :


« Qu’il s’agisse de prouver l’excellence de l’inceste, de la sodomie, du meurtre, toujours intervient la dialectique du fair is foul and foul is fair, et c’est avec une monotonie fatigante et mélancolique que revient le souvenir de ce refrain, scandant les lourdes, pompeuses et prétentieuses périodes de ce sinistre bel esprit. Mais il continue, impitoyable comme la pluie et la destinée, car il ne se rend même pas compte de l’ennui qu’il distille. »


M. Jean Florence dit encore : « De Sade, écrivain, est un bien pauvre homme. S’il n’est pas un précurseur de Zola, il est un très faible disciple de Diderot. Parmi les disciples de Diderot, qui furent nombreux et où l’on peut compter deux esprits au moins qui sont loin du médiocre, Sébastien Mercier et Restif de la Bretonne, de Sade est certainement l’un des plus faibles, des plus ternes et des plus insignifiants et qui font le moins d’honneur au maître. »

En tout cas, le marquis de Sade a exercé une véritable influence sur les romanciers français du xixe siècle, comme Eugène Sue, Balzac et Flaubert.


503-504. — Justine, ou Les Malheurs de la Vertu. « O mon ami ! la prospérité du crime est comme la foudre dont les feux trompeurs n’embellissent un instant l’atmosphère, que pour précipiter dans les abîmes de la mort, le malheureux qu’ils ont ébloui. » — En Hollande, chez les Libraires Associées, 1791.