Page:Apollinaire - La Femme assise.djvu/108

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main aux fillettes, leur prenaient la taille, les embrassaient effrontément en bavardant, en riant, en faisant des grimaces à l’adresse des voyageurs.

« Une de ces petites filles fumait la cigarette, l’écartant après chaque bouffée qu’elle expirait les yeux fermés. C’étaient les premiers nés de la ville naissante.

« Cités ! vous êtes les monuments les plus sublimes de l’Art humain. Le mouvement indéfini de la marche humaine s’élève vers l’immobilité infinie. La lassitude fait souhaiter au monde le repos plein d’activité de la vie végétative. Des vagabonds s’arrêtent et, se tenant les uns près des autres comme les arbres dans la forêt, ils plantent des racines artificielles, leurs maisons se dressent, la ville projette ses ombres. Et l’unité merveilleuse du nouvel établissement, avec ses tours et ses demeures, ses aqueducs et ses cloaques, ses architectes et ses pontifes, apparaît tout entière dans le nom de la cité.

« Ces enfants jouaient au soleil et on ne leur avait pas enseigné la pudeur. Ils