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LE POÈTE ASSASSINÉ

je suis un homme d’affaires excellent et nul ne s’y entend mieux que moi pour gérer une fortune.

— Ce soir, vous mettrez à la poste une lettre pour La Voix d’Adelaïde, vous direz tout cela et ainsi vous serez à l’abri.

— Je n’y manquerai pas, dit Paponat. A-t-on jamais vu ça, poète ! c’est bon pour Croniamantal.

— J’espère bien, dit Tristouse, qu’on va le massacrer à Brünn, où il pensait nous trouver.

— Mais justement le voilà, dit doucement Paponat. Il est dans la foule. Il se cache, il ne nous a pas vus.

— Je voudrais qu’on le massacrât sans tarder, dit Tristouse avec un soupir. J’ai idée que cela ne tardera pas.

— Regardez, dit Paponat, voici venir le héros.

Le cortège qui amenait Tograth étant arrivé devant l’hôtel, on déposa l’agronome sur le sol. Tograth se tourna vers la foule et lui parla :

« Marseillais, je pourrais, pour vous remercier, employer des paroles plus grosses que votre célèbre sardine. Je pourrais faire un long discours. Mais ces paroles ne seraient jamais proportionnées à la