Page:Apoukhtine - La Vie ambiguë.djvu/258

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mais ma plaisanterie fut mal prise : elle se fâcha, parut blessée. À la réponse qu’elle murmura je ne compris rien, et j’allai rejoindre dans un coin les gouvernantes.

À ce moment, Michel Kozielsky, se dandinant et cambrant sa poitrine, s’approcha de Lydia et lui demanda à haute voix :

— Lydia Lvovna, aimez-vous beaucoup Melchissédec ?

Toutes les demoiselles éclatèrent de rire.

Je n’entendis pas la réponse de Lydia, mais il me sembla qu’elle se fâchait. « Qui est ce Melchissédec ? pensai-je. Sans doute quelque nouvel adorateur. Comme je suis en retard ! Autrefois je savais par cœur tous leurs noms. À la façon dont son nom y ressemble, c’est peut-être l’officier de la garde Melkhovsky, mais Melkhovsky jusqu’ici faisait la cour à Nadia Kozelskaïa. » J’étais si intrigué que je voulus m’adresser à Lydia, pour résoudre l’énigme, mais on m’appela pour le whist. Jamais je n’ai joué si mal ; mon partenaire était furieux, et j’étais ravi parce que je le considérais comme un ennemi.

Du salon on entendait les voix claires et gaies de cette jeunesse, qui naguère encore me semblait si sympathique. Et maintenant que suis-je pour eux ? Un étranger, et peut-