Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, I.djvu/160

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Lucius, dit-elle, que je crains terriblement pour vous, et que vous me causez autant d’inquiétude que si vous étiez mon propre fils. Gardez-vous, mais gardez-vous bien des maudits artifices et des détestables attraits de Pamphile, femme de Milon, chez qui vous dites que vous logez. Elle passe pour la plus grande Magicienne et la plus dangereuse qui soit dans cette ville : par le moyen de certaines herbes, de certaines petites pierres, et de quelques autres bagatelles de cette nature, sur lesquelles elle souffle, elle peut précipiter la lumière (12) des astres, jusqu’au fond des Enfers, et remettre le monde dans son premier chaos. D’ailleurs aussi-tôt qu’elle voit (13) quelque jeune homme beau et bien fait, elle en est éprise et y attache son cœur. Elle l’accable de caresses, s’empare de son esprit, et l’arrête pour jamais dans ses liens amoureux. Mais, indignée contre ceux qui lui résistent, d’un seul mot, elle change les uns en pierres, ou en différens animaux, et fait mourir les autres. Cela me fait trembler pour vous, et j’ai voulu vous en avertir, afin que vous fussiez sur vos gardes ; car cette femme est toujours amoureuse, et vous lui convenez fort, jeune et bien fait comme vous êtes.

Voilà ce que me dit Birrhene, fort inquiète sur ce qui me regardoit. Mais, sitôt que j’eus entendu parler de cet art magique, pour lequel j’avois une curiosité extraordinaire, tant s’en fallut que j’eusse