Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, I.djvu/278

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l’on coupe aux jeunes gens les mieux faits ? Si tu ne t’arrêtes, je te vais mettre tout présentement entre les mains de la Justice. En disant cela, il fourre sa main dans mon sein, et tout en fureur, il y reprend les cheveux que j’y avois déjà cachés.

Très-fâchée de ce qui venoit de m’arriver, et faisant réflexion à l’humeur de ma maîtresse, qui se met dans une colère épouvantable quand je manque à faire ce qu’elle m’ordonne, jusqu’à me battre quelquefois à outrance, je songeois à m’enfuir ; mais l’amour que j’ai pour vous m’en ôta aussi-tôt le dessein. Comme je m’en revenois donc fort triste d’avoir les mains vuides, j’apperçois un homme qui tondoit avec des ciseaux des outres de chevre. Après qu’il les eut liés comme il faut, et bien enflés, en sorte qu’ils se soutenoient debout, je ramasse à terre une bonne quantité de poil de ces outres, qui étoit blond, et par conséquent semblable aux cheveux du jeune Béotien ; et je le donne à ma maîtresse, en lui déguisant la vérité. Dès le commencement de la nuit, et avant que vous fussiez de retour du souper de Birrhene, Pamphile, toute hors d’elle-même, monte dans une guérite couverte de bois, qui est au haut de la maison, et qui a des fenêtres ouvertes de toutes parts, pour recevoir tous les vents, et pour découvrir l’orient et les autres côtés du monde ; lieu qu’elle a choisi comme l’endroit le plus propre à travailler en secret à ses enchantemens.