Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, I.djvu/368

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sacrifice, chantant quelques Hymnes à l’honneur du dieu Mars ; ensuite ils prirent un peu de repos. La vieille femme nous donna de l’orge en abondance et sans la mesurer ; de manière que mon cheval qui mangeoit sa portion et la mienne, n’étoit pas moins aise que, s’il eût fait aussi bonne chère que les prêtres Saliens (38). Pour moi, quoique j’aie toujours assez aimé l’orge mondé, comme les hommes le mangent, je ne balançai point à quitter celui-là qui étoit crud, pour aller dans un coin où j’avois apperçu ce qui étoit resté de pain du repas qu’on venoit de faire, dont je mangeai avec une avidité et un appétit extraordinaire (39).

La nuit étant assez avancée, les voleurs s’éveillèrent et songèrent à décamper. Ils s’équipèrent différemment : les uns s’armèrent d’épées, et les autres se déguisèrent en fantômes. En cet état, ils sortirent tous à la hâte. A mon égard, le sommeil qui me pressoit ne m’empêcha point de manger de la même force, et quoique je fusse content à chaque repas d’un pain ou de deux tout au plus quand j’étois Lucius, alors contraint de m’accommoder à la capacité de mon estomac, j’achevois la troisième corbeille pleine de pain, et je fus bien étonné que le jour me surprit en cette occupation. Je m’en retirai enfin, avec peine à la vérité, cependant, comme un âne qui a de la pudeur, et j’allai appaiser ma soif à un petit ruisseau qui n’étoit pas loin de là.