Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, II.djvu/181

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avoit une femme qui étoit aussi fort pauvre, mais très-fameuse par l’excessive débauche où elle s’abandonnoit. Un jour son mari étant sorti de chez lui dès le matin, pour aller travailler, un homme hardi et effronté y entra secrétement l’instant d’après. Pendant que la femme et lui étoient ensemble, comme des gens qui se croient en sûreté, le mari qui ne savoit rien de ce qui se passoit, et qui n’en avoit même aucun soupçon, revint chez lui, bien plutôt qu’on ne l’attendoit, et louant en lui-même la bonne conduite de sa femme, parce qu’il trouvoit la porte de sa maison déjà fermée aux verroux, il frappe et siffle, pour marquer que c’étoit lui qui vouloit entrer. Sa femme qui étoit adroite, et fort stilée en ces sortes d’occasions, fait retirer l’homme d’auprès d’elle, et le cache promptement dans un vieux tonneau vuide, qui étoit au coin de la chambre, à moitié enfoncé dans la terre (7) ; ensuite ayant ouvert la porte à son mari, elle le reçoit en le querellant. C’est donc ainsi, lui dit-elle, que tu reviens les mains vuides, pour demeurer ici les bras croisés à ne rien faire, et que tu ne continueras pas ton travail ordinaire pour gagner de quoi avoir quelque chose à manger ? Et moi, malheureuse que je suis, je me romps les doigts jour et nuit, à force de filer de la laine, afin d’avoir au moins de quoi entretenir une lampe pour nous éclairer le soir dans notre pauvre maison. Hélas ! que Daphné,