Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, II.djvu/227

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dire qu’il faudroit brûler vives toutes ces femmes-là.

Cependant, comme elle se sentoit coupable elle-même, elle exhortoit son mari à s’aller coucher, afin de tirer plutôt son amant de la posture contrainte où il étoit sous ce van ; mais le meunier, dont le repas avoit été interrompu chez le foulon, et qui s’en étoit revenu sans manger, la prioit de lui donner à souper. Aussi-tôt elle lui servit, bien à contre-cœur, ce qu’elle avoir destiné pour un autre. Je souffrois alors une peine effroyable, en faisant réflexion à ce que cette méchante femme venoit de faire, quand elle avoit entendu le retour de son mari, et à l’effronterie qu’elle montroit malgré cela. Et je consultois sérieusement en moi-même si je ne trouverois point quelque moyen de rendre service au meunier, en lui découvrant les fourberies de sa femme, et si je ne pouvois point manifester le jeune homme aux yeux de tous les gens de la maison, en jettant le van qui le couvroit, et sous lequel il étoit couché comme une tortue.

Pendant que j’étois ainsi affligé de l’outrage qu’on faisoit à mon maître, la providence des Dieux vint à mon secours ; car un vieillard boiteux qui étoit chargé du soin des chevaux, voyant qu’il étoit l’heure de les abreuver, nous conduisit tous ensemble à un étang qui étoit près de là ; ce qui me fournit une occasion favorable pour me venger. J’apperçus, en passant, le bout des doigts du jeune