Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, II.djvu/297

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de sa mauvaise conscience, commença à dire et à affirmer, comme des vérités, une suite de mensonges qu’il avoit inventés. Il assuroit que le jeune homme, indigné de voir que ses infâmes poursuites auprès de sa belle-mère étoient inutiles, l’avoit appellé, et que, pour se venger d’elle, il lui avoit donné la commission de faire mourir son fils, qu’il lui avoit promis une grande récompense, pour l’obliger au secret. Que lui ayant refusé de commettre un tel crime, l’autre l’avoit menacé de le tuer, et lui avoit donné du poison délayé de sa propre main dans du vin, afin qu’il le fît prendre à son frère, et que ce méchant homme ayant soupçonné qu’il négligeoit de le donner, et qu’il le vouloit garder pour servir de preuve contre lui, l’avoit présenté lui-même à ce jeune enfant.

Après que ce malheureux, digne des plus grands châtimens, eut, avec une frayeur affectée, achevé sa déposition, qui paroissoit vraisemblable, l’affaire ne souffrit plus aucune difficulté, et il n’y eut pas un des sénateurs assez favorable au jeune homme, pour ne le pas condamner à être cousu dans un sac et jetté dans l’eau (5), comme convaincu des crimes dont on l’accusoit. Tous les juges étant de même avis, ils étoient prêts de mettre chacun leur billet de condamnation dans l’urne d’airain, suivant la coutume qu’on observe de tout temps : ces billets y étant mis une fois, décidoient du sort du criminel,