Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, II.djvu/309

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

encore éprouvé une plus favorable destinée ; car le soir, après le soupé, qui étoit toujours magnifique, et d’un fort grand appareil, ils avoient coutume de rapporter dans leur office quantité de bons morceaux de ce qu’on desservoit. L’un y serroit des restes de porc, de volailles, de poissons et de toutes sortes de ragoûts, et l’autre des pains, des gâteaux, des tourtes, des biscuits, et quantité de friandises et de confitures ; si bien que, lorsqu’après avoir fermé la porte de leur appartement, ils alloient aux bains pour se délasser, je me rassasiois de ces mets que m’offroit la fortune ; car je n’étois point assez fou ni assez âne pour manger du foin, pendant que je pouvois faire bonne chère.

L’adresse, avec laquelle je faisois ce larcin me réussit quelque temps, parce que j’étois encore timide dans les commencemens, et que je ne prenois qu’un peu de chaque chose, outre que mes maîtres n’avoient garde de se défier d’un animal tel que moi. Mais, lorsque je fus devenu un peu plus hardi, je commençai à choisir mes morceaux, et à ne manger que ce qu’il y avoit de meilleur en viande et en pâtisserie ; ce qui les mit dans une fort grande inquiétude, et, sans se douter que je fusse capable d’une pareille chose, ils mirent tous leurs soins à rechercher qui