Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, II.djvu/327

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et me tint des discours passionnés, comme si j’eusse été son amant. Je t’aime, je brûle pour toi, tu es le seul que je choisisse, je ne saurois vivre sans toi, et plusieurs autres discours par lesquels les femmes savent si bien attirer les hommes, et leur prouver de l’amour.

M’ayant pris par le licol, elle me fait aisément coucher de la manière que je l’avois appris, et qui ne me paroissoit ni nouvelle ni malaisée, quoiqu’après bien du temps je dusse me jetter dans les bras d’une si belle femme. En outre, j’avois bu une assez grande quantité de bon vin, et l’odorante onction me provoquoit singulièrement à la volupté ; mais, ce qui m’inquiétoit le plus, étoit de savoir comment, avec d’aussi longues cuisses, je pourrois approcher une femme si douillette, ou bien serrer avec une corne aussi dure, des membres aussi blancs et si délicats, tout confits en lait et en miel ; comment encore, avec une si grande et si énorme bouche garnie de dents aussi larges que des pierres, je pourrois baiser ces petites lèvres empourprées d’une ambrosie rosée ; enfin comment, malgré la luxure qui la transportoit, elle pourroit endurer un combat si démésuré.

Ah ! malheureux, me disois-je, tu gâteras cette gentille femme, et puis sacrifié aux bêtes féroces,