Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, II.djvu/333

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sœur, en prenant d’elle tous les soins imaginables, quoiqu’il ne lui fît voir en public qu’une amitié ordinaire. Il commença par lui faire un bien qui lui étoit nécessaire. Il la retira chez lui, comme une fille de son voisinage, qui étoit dans le besoin, et qui ne recevoit aucun secours de ses parens ; ayant en même-temps formé le dessein de la marier dans peu avec un de ses intimes amis, et de lui donner une dot considérable.

Mais ce dessein, qui étoit fort bon et fort innocent, ne put éviter les traits de la fortune ennemie. Elle fit naître une cruelle jalousie dans la maison de ce jeune homme, et sa femme se porta à commettre les crimes, pour lesquels elle venoit d’être condamnée à être livrée aux bêtes féroces, comme je l’ai dit d’abord. Elle commença par avoir de grands soupçons sur la conduite de cette jeune fille, qu’elle regardoit comme sa rivale, et la maîtresse de son mari ; ensuite elle conçut une haine effroyable contre elle, et enfin elle se résolut à la faire mourir cruellement. Voici de quelle manière elle s’y prit. Elle déroba l’anneau de son mari, s’en alla à la campagne, et de-là elle envoya un valet, en qui elle se confioit, qui étoit un scélérat, dire à la fille, que le jeune homme étoit à sa terre, et qu’elle ne tardât pas à venir l’y trouver seule, et sans aucune suite ; et de peur qu’elle n’en fît quelque difficulté, cette méchante femme donna à ce valet l’anneau qu’elle