Page:Arène - Œuvres, 1884.djvu/171

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Mais Roset avait mieux à faire que de philosopher sur ma sottise. Nivoulas, disparu depuis trois mois, revenait de province, plus amoureux que jamais, avec un héritage, et pardonnait tout, à cette condition qu’on l’aimerait comme autrefois, et qu’on renoncerait aux Mingréliens, aux Valaques et à Jean-des Figues.

— « Faut-il que je renonce ? me demanda Roset.

— Mon Dieu, oui ! Pourquoi pas ? lui répondis-je la rage au cœur, mais sans rien en laisser voir.

— Adieu alors, Jean-des-Figues !

— Adieu, Roset. »

C’est ainsi que nous nous quittâmes ; et le soir même, un grand désir de calme, de repos aux champs m’étant venu, le soir même je m’embarquais pour Canteperdrix, triste, il est vrai, mais heureux aussi de voir une fin à mes ridicules amours et à mon ridicule martyre.

Pourtant, au moment de partir, je crus me rappeler que le matin, en nous quittant, lorsqu’elle me disait : Adieu, Jean-des-Figues ! de sa voix malicieuse, Roset avait une larme, une toute petite larme au coin de l’œil.

— Est-ce que par hasard elle m’aimerait ? Et j’eus presque envie de ne plus partir. Mais je m’aperçus que moi-même je pleurais. Alors tout mon scepticisme me reprenant :

— Fou, fou, que tu es ! m’écriai-je, de croire que Roset a pu t’aimer. Roset, tu le sais bien, n’aime que les caroubes et la cigarette, et si ses