Page:Arène - Œuvres, 1884.djvu/38

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Qu’y avait-il donc dans cette malle ? Je restais quelquefois des heures à la regarder, partagé entre le désir de savoir et la crainte. Un matin, pourtant, je l’ouvris — on m’avait laissé seul à la maison, — je l’ouvris, le cœur palpitant et la main tremblante… Que de choses, grands dieux, j’y trouvai !

C’était, dans un fouillis de vieux journaux et de manuscrits inachevés :

  Une pipe turque et sa blague,
  Trois romans et cinq volumes de vers,
  Un miroir à main,
  Un pistolet,
  Une lime à ongles,
  Un gant mignon qui sentait l’ambre,
  Une liasse de lettres d’amour,
  Un portrait de femme dans une pantoufle,
  Et un oiseau-mouche empaillé !

De tout le jour, je ne quittai pas mes trésors, lisant les journaux, feuilletant les livres, dénouant, que l’ombre de Mitre me pardonne ! le ruban fané qui retenait les lettres d’amour ; regardant, pour échapper à l’émotion, le miroir à main, le pistolet et la pipe, symboles d’une vie d’aventures et de poésie ; puis revenant aux lettres d’amour, au gant, à la pantoufle, à la dame. Il n’était pas jusqu’au petit oiseau bleu et or, dont la présence au milieu de ces bagatelles parfumées ne m’attendrît ; je lui devinais-là je ne sais quelle signification amoureusement et douloureusement ironique.