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CONTES DE PROVENCE

êtres maussades et lents, ne riant pas, ne criant pas, enfin d’une autre espèce que nous ; et, par un sentiment d’égoïsme naïf et féroce, on trouvait juste, naturel, amusant presque que la Mort vînt prendre les vieux. Bien entendu, on ne prévoyait pas le cas où grand-père, grand’mère seraient morts. L’enfant a peu d’idées générales ; et puis, pour chacun de nous, grand-père et grand’mère n’étaient pas des vieux comme les autres : c’était grand-père et c’était grand’mère.

Mais personne n’échappe au Destin ! je devais bientôt connaître à mon tour et avant mon tour l’amertume des séparations douloureuses.


J’arrivais alors sur mes huit ans et j’avais une camarade de mon âge que j’aimais d’une affection enfantine. Des cheveux d’or, des yeux bleu clair, genre de beauté rare chez nous où les filles brûlées et brunes ont longtemps l’air de garçonnets. On l’appelait indif-