Page:Arène - La Chèvre d’or.djvu/191

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seul les voler tous et ravir l’immémorial héritage du Puget-Maure ! Ceci aussitôt fait scandale, allume les haines et déchaîne les convoitises.

Je suis surveillé, suspecté.

Dans les rues, je surprends, à chaque tournant, des regards, des gestes hostiles. Les femmes, me montrant, se parlent à voix basse. Les enfants ne m’injurient pas encore, mais déjà ils oublient de me saluer.

Aux champs, il n’y a pas de coin de muraille, il n’y a pas de tronc d’arbre ni de bouquet de cactus, où je ne devine, m’épiant, un œil soupçonneux et noir ; et ce n’est plus uniquement par contenance que je prends mon fusil lorsque je sors en promenade.

Le curé lui-même, cet excellent abbé Sèbe, par amour de la paix, se détourne de moi.

Seul, Peu-Parle ne craint pas de rester notre ami.

Ganteaume va le voir tous les jours, dans son désert, malgré mes recommandations de prudence, et, bavardant avec lui de la Chèvre d’Or, s’exalte aux divagations fatalistes et visionnaire du bonhomme.