Page:Arène - La Chèvre d’or.djvu/31

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Aujourd’hui le vent a augmenté.

Au cagnard, entre deux buttes de sable tiède où le vif soleil des jours de mistral allume des paillettes, nous causons, patron Ruf et moi, tandis que là-bas Tardive cuisine et que Ganteaume vagabonde sur la plage ramassant, pour me les montrer, des coquilles, des os de seiche, des pierres ponces, et les épis d’algue feutrés en boules brunes que rejette au milieu de flocons d’écume la grande colère de la mer.

Dans nos conversations, c’est généralement de politique qu’il s’agit.

Grave, rasé, l’air d’un Latin, patron Ruf, plus que jamais, maintient la République. Paris le préoccupe beaucoup. Il en admire les grands hommes. Et n’ayant guère pour lecture qu’un vieux Plutarque dépareillé, il se figure Paris comme Rome ou Athènes. Il possède dans sa cabane un buste en plâtre de Marianne qu’il appelle sérieusement la déesse et qui fait pendant à une sainte Marthe domptant la tarasque, que Tardive apporta de Tarascon. Les jours de fête, Tardive partage ses fleurs entre sainte Marthe et Marianne. Parfois aussi elle se révolte :

— « Eh té ! qu’est-ce qu’elle peut nous donner