Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 1.djvu/163

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pas son étonnement, lorsqu’il aperçut que la lumière s’y partageait en deux faisceaux distincts, d’intensités précisément égales, lorsqu’il eut reconnu, en un mot, qu’à travers ces cristaux d’Islande, qu’on a trouvés depuis dans une multitude de localités, car ils ne sont que du carbonate de chaux, tous les objets se voient doubles. La théorie de la réfraction tant de fois remaniée, avait donc besoin d’un nouvel examen ; tout au moins elle était incomplète, puisqu’elle ne parlait que d’un rayon et qu’on en voyait deux. D’ailleurs, le sens et la valeur de l’écartement de ces deux rayons changeaient en apparence de la manière la plus capricieuse, quand on passait d’une face de cristal à l’autre, ou lorsque sur une face donnée la direction du rayon incident variait. Huygens surmonta toutes ces difficultés ; une loi générale se trouva comprendre dans son énoncé les moindres détails du phénomène ; mais cette loi, malgré sa simplicité, malgré son élégance, fut méconnue. Les hypothèses avaient été pendant tant de siècles des guides inutiles ou infidèles ; on les avait si longtemps considérées comme toute la physique, qu’à l’époque dont je parle, les expérimentateurs en étaient venus sur ce point à une sorte de réaction ; or dans les réactions, même en matière de science, il est rare qu’on garde un juste milieu. Huygens donne sa loi comme le fruit d’une hypothèse, on la rejette sans examen ; les mesures dont il l’étaie ne rachètent pas tout ce qu’on trouve de vicieux dans son origine. Newton lui-même se range parmi les opposants, et, dès ce moment, les progrès de l’optique sont arrêtés pour plus d’un siècle. Depuis, il n’a fallu rien moins que les nombreuses expé-