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Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 1.djvu/512

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sur l’origine de l’alphabet, comme s’il avait été le contemporain de Cadmus. Un célèbre critique s’étant mis de la partie, vous eussiez dit que le vieillard avait consacré sa vie tout entière à l’étude des belles-lettres et de l’économie politique. Il serait superflu de mentionner les sciences : c’était sa carrière brillante et spéciale ; cependant, quand il parla avec notre compatriote Jedediah Cleishbotham, vous auriez juré qu’il avait été le contemporain de Claverhouse et de Burley, des persécuteurs et des persécutés ; il aurait fait, en vérité, le dénombrement exact des coups de fusil que les dragons tirèrent sur les Covenants fugitifs. Nous découvrîmes, enfin, qu’aucun roman du plus léger renom ne lui avait échappé, et que la passion de l’illustre savant pour ce genre d’ouvrages était aussi vive que celle qu’ils inspirent aux jeunes modistes de dix-huit ans. »

Si notre confrère l’eût voulu, il se serait fait un nom parmi les romanciers. Au milieu de sa société intime, il manquait rarement d’enchérir sur les anecdotes terribles, touchantes ou bouffonnes qu’il entendait conter. Les détails minutieux de ses récits, les noms propres dont il les parsemait ; les descriptions techniques des châteaux, des maisons de campagne, des forêts, des cavernes où la scène était successivement transportée, donnaient à ces improvisations un si grand air de vérité, qu’on se serait reproché le plus léger sentiment de défiance. Certain jour, cependant, Watt éprouvait de l’embarras à tirer ses personnages du dédale dans lequel il les avait imprudemment jetés. Un de ses amis s’en aperçut au