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Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 1.djvu/570

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sions, et, pour se venger, il publia une édition de l’éloge de Vauban accompagnée de notes où l’offense, où l’outrage, étaient portés à leur comble. Il y avait dans ce pamphlet de quoi bouleverser mille fois la tête d’un jeune homme ; cependant, en cette difficile occurrence, Carnot se montra déjà ce qu’il a toujours été depuis : franc, loyal, et complètement insensible à des injures non méritées.

« Si vos soupçons étaient fondés, écrivit-il à son fougueux antagoniste, j’aurais méconnu les premiers devoirs de l’honnêteté, de la décence ; j’aurais manqué surtout aux égards infinis que les militaires doivent à un général distingué : croyez qu’il n’est aucun officier du génie qui n’apprît, avec le même plaisir, de M. le marquis de Montalembert, à bien fortifier les places, que du brave d’Essé à les bien défendre. »

On appréciera l’à-propos, la délicatesse de cette citation, quand j’aurai dit que le brave d’Essé, qui, en 1543, après plus de trois mois d’une résistance héroïque, obligea toutes les forces de l’Empereur à lever le siège de Landrecies, était un des ancêtres de M. de Montalembert.

La modération, la politesse, sont un moyen de succès presque infaillible contre la violence et l’outrage ; aussi, dans les luttes de la presse, faut-il souvent les envisager comme le simple résultat d’un calcul, comme une preuve d’habileté. Mais la lettre de Carnot ne permettait pas de se méprendre sur la sincérité de ses sentiments. Votre ouvrage, écrivait-il à celui qui venait de critiquer amèrement le fond, le style, je puis presque ajouter la ponctua-