Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/139

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de nobles idées. Tel nous le voyons ici en morale, tel nous le trouverons plus tard en politique. En applaudissant dès à présent à cette rare constance, je n’entends pas insinuer, Dieu m’en garde, que les nombreux changements de bannière auxquels nous avons assisté, que même les plus subits, n’étaient pas consciencieux. Je sais seulement que, par une déplorable fatalité, le public les a vus presque constamment marcher de compagnie avec des faveurs de toute nature, en sorte que des esprits soupçonneux ont eu un prétexte pour parler de cause et d’effet.

Le premier fruit des méditations auxquelles Condorcet se livra chez M. Giraud de Kéroudou, fut un ouvrage intitulé Essai sur le calcul intégral. L’auteur n’avait pas encore vingt-deux ans quand il le présenta à l’Académie.

Permettez que je fasse précéder de quelques réflexions générales ce que j’ai à dire de ce traité et des autres travaux mathématiques de Condorcet.

On citerait à peine, dans le vaste domaine des sciences, huit à dix découvertes importantes qui, pour arriver à maturité, n’aient pas exigé les efforts successifs de plusieurs générations de savants. Malheureusement, par un amour-propre mal entendu, les derniers inventeurs mettent rarement les historiens de la science dans la confidence de leurs emprunts ; ils aiment mieux étonner qu’instruire ; ils ne voient pas assez combien le rôle de débiteur loyal est doux, en regard de celui qui peut soulever des soupçons de mauvaise foi.

Ici se place une distinction essentielle :

Dans les sciences d’observation, toutes les assises dont