Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/203

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laissa lire ses discours au Cercle social. Cette assemblée les fit imprimer. De ce moment date la malheureuse rupture qui, brusquement et sans retour, sépara notre confrère de ses meilleurs, de ses plus anciens amis, et en particulier du duc de La Rochefoucauld.

Quand les questions que l’arrestation de Varennes devait inévitablement soulever arrivèrent à la tribune nationale, Condorcet, quoiqu’il ne fût pas membre de l’Assemblée, y devint l’objet d’attaques, d’injures personnelles des plus violentes. L’illustre publiciste admettait sans difficulté que ses opinions pussent être entachées d’erreur ; mais en interrogeant la vie de ceux qui lui faisaient une guerre si acharnée, leurs superbes dédains excitaient sa surprise. « Il se demandait (je copie ici un passage manuscrit) s’il était excessivement ridicule qu’un géomètre de quarante-huit ans, qui depuis près d’un tiers de siècle cultivait les sciences politiques, qui le premier, peut-être, avait appliqué le calcul à ces sciences, se fût permis d’avoir une opinion personnelle sur les questions débattues à l’Assemblée constituante. »

Les mœurs parlementaires ne s’étaient pas encore développées. Condorcet ne pouvait deviner qu’un jour viendrait où, pour être admis à discourir sur toute chose, il faudrait impérieusement n’avoir fait ses preuves en aucun genre.

En 1791, après avoir quitté la municipalité de Paris, Condorcet devint un des six commissaires de la trésorerie nationale.

Les Mémoires qu’il publia à cette époque occuperaient une grande place dans l’Éloge d’un auteur moins