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AMPÈRE.

ne suffit plus au jeune écolier, son père le conduisit, de temps en temps, à Lyon, où il allait consulter les livres les plus rares, entre autres les œuvres de Bernoulli et d’Euler. Lorsque l’enfant chétif, délicat, adressa pour la première fois sa demande au bibliothécaire de la ville : « Les œuvres d’Euler et de Bernoulli ! s’écria cet excellent M. Daburon, que vous avez tous connu. Y pensez-vous bien, mon petit ami ? Ces ouvrages figurent au nombre des plus difficiles que l’intelligence humaine ait jamais produits ! — J’espère, néanmoins, être en état de les comprendre, repartit l’enfant. — Vous savez, sans doute, qu’ils sont écrits en latin, ajouta le bibliothécaire ? » Cette révélation atterra un moment notre jeune et futur confrère : il n’avait pas encore étudié la langue latine. Je n’ai, sans doute, nul besoin d’ajouter qu’au bout de peu de semaines, l’obstacle avait entièrement disparu.

Ce qu’Ampère cherchait surtout, même dans ses premières lectures, c’étaient des questions à approfondir, des problèmes à résoudre.

Le mot ’langue du ixe volume de l’Encyclopédie, le transporte, sur les rives de l’Euphrate, à la Tour de Babel, de biblique célébrité. Il y trouve les hommes parlant tous le même idiome. Un miracle, raconté par Moïse, engendre subitement la confusion. Chaque peuplade a, dès lors, une langue distincte. Ces langues se mêlent, se corrompent, et perdent peu à peu les caractères de simplicité, de régularité, de grandeur qui distinguaient leur souche commune. Découvrir cette souche, ou du moins la reconstituer avec ses anciens attributs,