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Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/26

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lait pour lire des mémoires de mathématiques ; mais leur cadence le charma. Dès ce moment, par une rare exception au principe du moraliste, qui déclarait le cœur humain inhabile à nourrir à la fois plus d’une vive passion, Ampère se livra, avec une ardeur infinie, à l’étude simultanée des plantes et des poëtes du siècle d’Auguste. Un volume du Corpus poetarum latinorum l’accompagnait dans ses herborisations, tout aussi bien que l’ouvrage de Linné. Les prés, les collines de Poleymieux, retentissaient journellement de quelque tirade d’Horace, de Virgile, de Lucrèce, de Lucain surtout, entre les dissections minutieuses d’une corolle ou d’un fruit. La quantité des mots latins devint si familière à notre Ampère que, quarante ans après, il composa cent cinquante-huit vers techniques, en chaise de poste, pendant une tournée d’inspection universitaire et sans jamais recourir au Gradus.

Les connaissances botaniques qu’il puisa dans ces études solitaires, n’avaient été ni moins profondes, ni moins durables. J’aurai le bonheur de pouvoir invoquer, sur ce point, un témoignage imposant, irrécusable : celui de notre confrère, M. Auguste de Saint-Hilaire.

Le genre Begonia est du nombre de ceux que l’illustre de Jussieu avait réunis sous le titre de incertœ sedis, parce qu’il n’était pas parvenu à en découvrir les rapports naturels. En arrivant au Brésil, où l’on trouve une assez grande quantité d’espèces de ce genre, M. de Saint-Hilaire les étudia avec le soin scrupuleux qui donne tant de prix à tous ses travaux, et reconnut leurs véritables affinités. Quelque temps après son retour en France, M. de Saint-Hilaire rencontra, dans le monde, M. Ampère qui, après