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Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/267

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bué à le jeter dans la carrière des sciences. Néanmoins, pour l’honneur des principes, il semble juste de protester contre les éloges qu’on a donnés aux prévisions de Lanoue, à la sûreté de son jugement, à l’excellence de ses conseils. Qu’est-ce à dire ? Un enfant de seize à dix-sept ans composera deux tragédies médiocres, et ces essais décideront irrévocablement de son avenir ! On a donc oublié que Racine, déjà parvenu à l’âge de vingt-deux ans, débuta par Théagene et Chariclée, par les Frères ennemis ; que Crébillon avait près de quarante ans quand il composa une tragédie sur la Mort des enfants de Brutus, dont on n’a pas retenu un seul vers ; enfin, que les deux premières comédies de Molière, les Trois docteurs rivaux et le Maître d’école, ne sont plus connues que par leurs titres. Rappelons-nous cette réflexion de Voltaire : « Il est bien difficile de réussir avant trente ans dans un genre qui exige la connaissance du monde et du cœur humain. »

Un heureux hasard fit voir que les sciences pourraient ouvrir au poëte découragé une carrière honorable et glorieuse. M. de Moncarville offrit de lui enseigner les mathématiques, en échange des leçons de dessin que Moncarville le fils recevait du garde des tableaux du roi. L’arrangement ayant été agréé, les progrès de Sylvain Bailly dans ces nouvelles études furent brillants et rapides.