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Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 3.djvu/565

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sujets qui élèvent l’âme, qui font vibrer le cœur, qui nous rendent meilleurs, il dépensait ses forces en vaines subtilités sans influence sur les progrès de l’esprit humain.

Quelques mots seulement, et le côté par lequel le grand homme aimait surtout à être apprécié, se présentera dans tout son jour.

Après avoir résisté à de nombreuses, à de pressantes sollicitations, Poquelin quitte, à quatorze ans, l’atelier et la boutique de son père. Vous le voyez aussitôt se livrant aux études les plus solides, et particulièrement à celle des sciences, sous le célèbre Gassendi. Poquelin ne pensait pas, avec la jeunesse présomptueuse de son époque, que les dons naturels pussent fructifier sans culture.

En ce temps-là on croyait sérieusement dans le monde entier, qu’un comédien était un homme dégradé. Réciter en public, avec l’approbation et en présence des magistrats, même ses propres ouvrages, paraissait un crime digne de damnation.

Molière dédaigna cet absurde préjugé. Il se fit comédien et auteur. De cette époque datent en France les principaux progrès de l’art théâtral, ce noble délassement des esprits de toutes les conditions et de tous les âges.

La conduite irréprochable de Molière après sa grave résolution, a plus contribué qu’on ne pense à faire tracer enfin une ligne de démarcation nette et précise entre l’honneur véritable et les honneurs de convention.

Des relations de collège et un talent reconnu eussent fait aisément de Molière le secrétaire d’un prince du sang. Les avantages d’une si belle position ne tentèrent