Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 3.djvu/75

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rassemble mes forces pour vous remercier de l’intérêt que vous prenez à mon état, pour vous dire que j’ai été très-heureux toute ma vie de rattachement mutuel de nos deux familles.

« Adieu, mon cher Arago. »


Me serais-je trompé, Messieurs, en me persuadant que dans cette occasion solennelle, je pouvais me parer à vos yeux d’un sentiment exprimé en termes si simples, si peu apprêtés, si exempts enfin de cette tendance à l’effet qui amena jadis madame de Sévigné à parler des amitiés d’agonie ? Une illusion, partant du cœur, me serait en tout cas pardonnée.

Les sinistres pressentiments de Gay-Lussac, de sa famille et du public, firent place momentanément à des idées plus rassurantes. Notre confrère Magendie, qui s’était empressé d’apporter les secours de sa science à son vieil ami, s’associa lui-même un moment à l’opinion commune.

Gay-Lussac fut transporté à Paris, où son état parut pendant quelques jours s’améliorer. Il nous parlait alors de ses futurs travaux et du regret qu’il éprouvait d’avoir, dans un moment où sa vie ne semblait pas devoir se prolonger, donné l’ordre à son fils Louis de brûler un traité intitulé : Philosophie chimique, et dont les premiers chapitres étaient entièrement achevés. Mais bientôt il fallut renoncer à toute espérance. L’hydropisie dont il avait été subitement atteint fit des progrès rapides, et notre ami expira sans forfanterie et sans faiblesse, le 9 mai 1850, à l’age de soixante-dix ans, pouvant dire comme un