Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 6.djvu/129

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maintenant les soldats d’Henriot, les séides de la commune, dans une ceinture de citadelles, et tout change de face, et Robespierre triomphe peut-être.

La conspiration de Mallet, en 1812, ne trouva et ne pouvait trouver ni appui ni sympathie dans la population parisienne. Que serait-il arrivé cependant si, au lieu de séduire les soldats des casernes de Popincourt ou de l’Ave-Maria, Mallet avait trompé les garnisons de la ceinture de citadelles ? Une fois compromis par leur première levée de boucliers, entièrement séquestrés de la ville, ne pouvant pas entendre les conseils qui les firent si promptement rentrer dans le devoir, maîtres d’une puissante artillerie, sait-on vraiment à quelles extrémités ces malheureux conscrits abusés ne se seraient pas portés ?

Les 8, 000 à 10, 000 hommes de la garde royale qui combattaient dans Paris en 1830, n’auraient certainement pas manqué d’aller se réfugier dans les forts détachés, si la Restauration, mieux avisée, se fût hâtée de les faire construire. De là, cette troupe d’élite eût rendu peut-être inutiles les efforts héroïques de la population de Paris ; tout au moins la lutte, au lieu d’être terminée en trois jours, aurait duré des semaines. Les camps de Saint-Omer, de Lunéville, quelques autres corps de troupes dévoués quand même, fussent arrivés, et la capitale et le pays tout entiers seraient probablement devenus le théâtre d’une effroyable guerre civile.

Si les forts restent debout, nos libertés, nos vies, nos propriétés peuvent être à la merci de quelques milliers de prétoriens, de quelques milliers de soldats factieux. Qu’on n’invoque pas contre moi ce qui s’est passé en