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notes scientifiques.

NOTE 4.

Étoiles filantes.

La note suivante, empruntée aux instructions que mon frère aimé rédigea en 1835 pour le voyage de circumnavigation de la corvette la Bonite, mettra les lecteurs au courant de tout ce qu’on sait aujourd’hui sur le phénomène des étoiles filantes.

« Depuis qu’on s’est avisé d’observer quelques étoiles filantes avec exactitude, on a pu voir combien ces phénomènes si longtemps dédaignés, combien ces prétendus météores atmosphériques, ces soi-disant traînées de gaz hydrogène enflammé, méritent d’attention. Leur parallaxe les a déjà placés beaucoup plus haut que, dans les théories adoptées, les limites sensibles de notre atmosphère ne semblaient le comporter[1]. En cherchant la direction apparente suivant laquelle les étoiles filantes se meuvent le plus ordinairement, on a reconnu, par une autre voie, que, si elles s’enflamment dans notre atmosphère, elles n’y prennent pas du moins naissance, qu’elles viennent du dehors. Cette direction la plus habituelle des étoiles filantes semble diamétralement opposée au mouvement de translation de la terre dans son orbite.

Il serait désirable que ce résultat fût établi sur la discussion d’une grande quantité d’observations. Nous croyons donc qu’à bord de la Bonite, et pendant toute la durée de sa navigation, les officiers de quart devront être invités à noter l’heure de l’apparition de chaque étoile filante, sa hauteur angulaire approchée au-dessus de l’horizon, et surtout la direction de son mouvement. En rapportant ces météores aux principales étoiles des constellations qu’ils traversent, les diverses questions que nous venons d’indiquer peuvent être résolues d’un coup d’œil. Voilà donc un sujet de recherches qui n’occasionnera aucune

  1. Des observations comparatives faites en 1825 à Breslau, à Dresde, à Leyde, à Brieg, à Gleiwitz, etc., par le professeur Brandes et plusieurs de ses élèves, ont donné jusqu’à cinq cents milles anglais (environ deux cents lieues de poste) pour la hauteur de certaines étoiles filantes.

    La vitesse apparente de ces météores s’est trouvée quelquefois de trente-six milles douze lieues par seconde. C’est à peu près le double de la vitesse de translation de la terre autour du soleil. Ainsi, alors même qu’on voudrait prendre la moitie de cette vitesse apparente pour une illusion, pour un effet du mouvement de translation de la terre dans son orbite, il resterait six lieues à la seconde pour la vitesse réelle de l’étoile. Six lieues à la seconde est une vitesse plus grande que celle de toutes les planètes supérieures, la terre exceptée.