Page:Arago - Souvenirs d’un aveugle, nouv. éd.1840, t.1.djvu/316

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

XIX

TIMOR

Diély. — Courte explication. — M. Pinto. — Détails. — Mœurs. — Boa.

Quand vous ne voudrez pas trouver d’incrédules en ce monde, ne racontez pas, ou plutôt ne dites aux hommes que ce qu’ils savent, ne leur apprenez rien ; ne leur parlez jamais que des objets qui les entourent, qui frappent leurs sens et avec lesquels ils vivent, pour ainsi dire, en famille. Hors de là vous trouverez le doute, le doute railleur, offensant, qui vous forcerait à mentir, si vous n’aviez le courage de trouver dans cette persécution même un motif de plus de résolution et de persévérance.

Eh, messieurs ! croyez-vous donc que l’on fait le tour du monde pour ne voir que des maisons alignées, des querelles de ménage, des cafés, des tables d’hôte, des marchands de briquets phosphoriques et des gardes nationaux en grande ou petite tenue ? Non, celui qui voyage et veut étudier ne s’arrête guère en face des tableaux qui lui rappellent le pays qu’il a quitté. Ce qu’il veut, lui, ce qu’il demande aux flots, à la terre, au ciel, ce sont des contrastes, de l’imprévu, du dramatique ; et maintenant, pour peu que l’âme du voyageur soit ardente, que son imagination bouillonne, pourvu qu’il ait du cœur au cœur, qu’il envisage les périls et la mort d’un œil tranquille, soyez sûrs qu’il verra ce que d’autres n’ont pas su voir, qu’il décrira ce que d’autres n’ont pas su décrire. Après cela, tant pis pour vous si vous êtes sans croyance ; il aura fait son de-