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XXVII

SUITE DES EXPLORATEURS

Et maintenant, si nous analysons le caractère de ces hardis explorateurs qui, sans avoir fait le tour du monde, n’en ont pas moins bravé les périls les plus imminents, nous les trouvons encore en parfaite harmonie avec la couleur de leur livre, où pointe cependant presque toujours cette idée première et dangereuse : Nul ne viendra me démentir.

Mongo-Park est audacieux ; il sait qu’il ouvre une route nouvelle à ses successeurs ; il n’a pas besoin d’appeler à son secours le mensonge et le merveilleux ; car le premier il dira ce que nul n’a vu avant lui.

Belzoni, Houtin, Clapperton, s’enfonceront dans les solitudes africaines et mourront martyrs de la science sous le fer des Arabes ou des Maures, ou sous les atteintes des plus horribles privations.

Puis vous retrouvez ce pauvre Caillé, aventureux jeune homme, sans instruction, sans talent, sans mémoire ni intelligence, qui marche, marche de caravane en caravane, longe les fleuves, se glisse dans les huttes, tantôt sans nourriture, sans vêtements, sans guide ; tantôt sans eau pour sa soif, sans armes pour sa défense ; avance encore, se trouve porté de revers en revers, de chute en chute, au centre de l’Afrique sauvage ; entre peut-être à Tombouctou, qu’il nous assure être une ville ronde, tandis qu’il nous la dessine carrée ; se sauve de cette capitale mystérieuse sans qu’on daigne le punir de son audace, franchit dans sa plus longue étendue le vaste désert, et arrive enfin à Tunis ou à Tripoli, où le consul français n’ose pas même constater la vérité de ses récits.

Et Bompland, ce patient et intrépide compagnon de voyage de Hum-