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des gouverneurs, y furent tuez. Quelques gouverneurs moins cruels, comme Mandelot à Lion et Carrouges à Rouen, se contentèrent, pour le commencement, de faire emprisonner les huguenots de leurs villes ; mais, peu de jours après, aussi bien furent-ils tuez.

Le mesme jour du lundi au matin, le Roy envoya quelques capitaines et soldats de sa garde à Chastillon-sur-Loin, pour luy amener les enfans de l’amiral et de son feu frère d’Andelot, de gré ou par force ; mais on trouva les aisnez partis et desjà sauvez à la fuite.

Le duc d’Anjou envoya pareillement des soldats de sa garde à la campagne, es environs de Paris, visiter les huguenots dans leurs maisons aux champs et les y tuer ; et afin que nul n’y fust espargné, il envoyoit à poinct nommé en divers quartiers ceux de ses soldats qui n’y cognoissoyent personne, tellement qu’aussi ils n’en espargnèrent pas un, excepté quelques-uns qui furent prins à rançon par ceux qui estoyent plus frians de l’argent ; et si ne laissoyent pas pourtant de tuer les prisonniers après leur rançon payée.

Ces jours de dimanche et de lundi, le temps fut beau et serein à Paris et ès environs, tellement que le Roy, s’estant mis aux fenestres du Louvre, contemplant le temps, dit qu’il sembloit que le temps se resjouist de la tuerie des huguenots.

Environ le midi de lundi (hors de toute saison) on vit un aubespin fleury au cemetière Sainct-Innocent ; sitost que le bruit en fust espandu par la ville, le peuple y accourut de toutes parts, criant : « Miracle, miracle ! » et les cloches en carillonnèrent de joye. On fut contraint, pour empescher la foule du peuple, et afin que le miracle (qui estoit, comme il a esté sceu, fait par l’artifice d’un bon vieux homme de cordelier) ne fust descouvert et avilé, on fut, dis-je, contraint d’asseoir des gardes à l’en-