Page:Ardouin-Dumazet, Voyage en France 10,1897.djvu/167

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La nuit est noire quand nous quittons Séez pour suivre la rive droite de l’Isère, par une route bien entretenue, mais solitaire. Sur près de deux lieues, ce fond de la vallée n’a presque pas de pente, mais, après la traversée du nant de Saint-Claude, dont les eaux descendent bruyamment des hautes cimes de la frontière italienne, de brusques lacets conduisent jusqu’à la terrasse où s’est bâtie Sainte-Foy. La voiture pénètre dans une rue étroite, bordée de maisons à galeries vivement éclairées, ce sont autant d’auberges. Là encore il y a des alpins, aussi est-il difficile de trouver un gîte. Enfin on nous accueille dans un des hôtels, Sabattier et moi, nous aurons chacun notre chambre. Le préparation des lits demande beaucoup de temps et nous avons hâte cependant d’échapper à la salle fumeuse et au tapage venant d’un bal tenu au-dessus. Enfin on vient nous chercher ; pour gagner nos chambres, il faut traverser la salle de danse… Elles ouvrent directement sur celle-ci !

Ah ! je m’en souviendrai de cette nuit ! Bergers et bûcherons, guides et douaniers, alpins et rouliers, lourdement chaussés, tapant du talon dans un ensemble formidable, avec de gros rires, de grands éclats de voix, des claques dans le dos, sautent au milieu des cris de : Balancez vos dames !