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bissaient celui des idées démocratiques que beaucoup d’entre eux avaient puisées dans leur éducation en Europe. C’étaient d’ailleurs les seules idées qui fussent conciliables avec leurs justes prétentions de parvenir à l’égalité des droits politiques dont jouissaient les blancs. Ils se pénétrèrent des principes de la révolution française dont l’égalité était la base, comme source de toute justice. Les chefs qu’ils se choisirent au début de la révolution avaient été presque tous élevés en France : ils étaient imbus de ces principes, d’abord en faveur de leur classe, pour arriver ensuite graduellement au même résultat, en faveur des esclaves de toutes couleurs. Cette marche méthodique leur était commandée par leur position, par la nature des choses, par les conseils de la société des Amis des noirs, pour ne pas effrayer, ni la métropole dont l’appui leur paraissait nécessaire, ni les colons eux-mêmes dont les intérêts menacés eussent été un obstacle invincible, puisque ces intérêts semblaient être liés à ceux de la France, pour la prospérité de son commerce et de sa navigation.


De ces observations fondées sur les faits antérieurs à la révolution, passons à un examen rapide de la conduite respective de Rigaud, homme du Sud, et de Toussaint Louverture, homme du Nord.

Que voyons-nous de la part de l’un et de l’autre ?

À l’ancienneté de ses services dans la cause de la liberté, Rigaud avait réuni la mission de défendre la province du Sud contre les Anglais, sous le titre de gouverneur général. En l’autorisant encore, en l’excitant à arrêter Montbrun, gouverneur général de l’Ouest, Polvérel l’avait rendu en quelque sorte l’arbitre des événemens dans