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conférences de Goureau, Caradeux avait repris ce projet dans des entretiens particuliers avec Bauvais et Pinchinat. Ceux-ci ne s’y prêtant point, Caradeux espéra encore les y entraîner par toutes les cajoleries dont il les entoura à leur entrée au Port-au-Prince. Les mulâtres se montrant toujours plus fidèles à la France que le blanc, ce dernier résolut alors de les amener à une autre combinaison non moins perfide ; et cette fois il réussit auprès de Bauvais et de Pinchinat.

Pour décider les blancs du Port-au-Prince au concordat du 11 septembre, Hanus de Jumécourt leur avait exposé le danger de mécontenter les hommes de couleur qui, au moyen des nègres suisses qu’ils avaient dans leurs rangs, pourraient soulever tous les ateliers d’esclaves et occasionner les mêmes ravages que dans la province du Nord. Or, pendant les conférences relatives à ce concordat, tenues sur la place de la Croix-des-Bouquets, les commissaires blancs avaient allégué le danger qu’il y aurait à retenir ces esclaves dans l’armée de couleur, parce qu’ils seraient, aux yeux des ateliers dont ils dépendaient et de tous autres, un exemple vivant de l’avantage de la sédition. Ces commissaires demandèrent donc que les suisses fussent remis à leurs maîtres respectifs, pour les punir selon que ces derniers le jugeraient convenable, ou qu’ils fussent livrés aux tribunaux, pour être poursuivis comme coupables de révolte.

Mais les hommes de couleur, et Rigaud principalement, s’opposèrent à l’une et l’autre proposition. Rigaud demanda formellement que les suisses fussent déclarés libres, par un article du concordat. Les blancs ayant persisté dans leur demande, Daguin, un des commissaires de couleur, aussi fougueux que Rigaud, dégaina